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  • : Le blog de Michèle Leflon
  • : Michèle Leflon, communiste, Vice présidente du conseil régional de Champagne Ardenne, a créé ce blog pour crier son indignation devant le recul de l'humain, la casse de la planète et favoriser le débat pour une alternative politique vraiment à gauche. Ce blog, tout particulièrement tourné vers les Ardennes, en présente des informations alternatives.
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michele.leflon@orange.fr


Vice-présidente du Conseil Régional de Champagne Ardenne, chargée de la formation professionnelle et de l'orientation

Membre du Conseil National du Parti Communiste Français.

Ancien médecin anesthésiste-réanimatrice à l'hôpital de Charleville Mézières.

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La nature dans les Ardennes

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29 août 2012 3 29 /08 /août /2012 19:57

hq29Sans doute les deux !

Une bouffée d'oxygène pour les jeunes qui en bénéficieront, une bouffée d'oxygène pour les employeurs du secteur non marchand portant des activités d'utilité sociale.

Mais un coup d'épée dans l'eau vis à vis des questions de fond qui sont posées : celle de la sécurisation des parcours professionnels dès la sortie de la formation initiale, celle des raisons du chômage des jeunes, celle des causes de la sortie des jeunes sans qualification de l'école, celle de l'incapacité des employeurs du secteur non marchand à financer des emplois socialement nécessaires ...

Avant de revenir sur ces questions essentielles, permettez moi déjà d'aborder ces nouveaux contrats sous l'angle formation et de vous faire part de ma plus grande inquiétude ! Car ces jeunes sans qualification, le but me semble devoir être de les qualifier, sauf à vouloir uniquement baisser temporairement les statistiques du chômage des jeunes. Comment ?

Je cite le communiqué de presse publié à l'issue du conseil des ministres : "L’emploi d’avenir offre les conditions d’une première expérience professionnelle réussie. Il pourra aboutir à une pérennisation dans l’emploi créé, à l’acquisition de compétences donnant au jeune des perspectives nouvelles dans une activité d’avenir, ou à la reprise d’une formation, en alternance le plus souvent, en lien avec la motivation trouvée pour un métier. Ce parcours de réussite reposera sur un fort engagement des employeurs (tutorat, formation…) et un accompagnement renforcé assuré principalement par les missions locales."

Quelle reconnaissance pour l'acquisition des compétences ? A-t-on pour but de vouer ces jeunes au SMIC à vie, faute de diplômes et/ou à l'insécurité de l'emploi ?

Comment pourront ils reprendre une formation en alternance ? Leur faudra-t-il chercher un employeur pour un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation ? Ne pourrait on pas prévoir qu'au moins dans les cas où ces jeunes souhaitent se former dans le domaine découvert au cours de leur contrat d'avenir, leur employeur ne soit obligé de leur assurer ce contrat en alternance, sous une forme sans doute nouvelle, pas tout à fait contrat de professionnalisation pour permettre une durée suffisante, pas tout à fait contrat d'apprentissage pour garantir le maintien d'un salaire au moins équivalent au SMIC pour ces jeunes qui auront acquis une indépendance financière vis à vis de leurs parents et vieilli, voir qui seront chargé de famille ?

Qui financera la formation ? Il est bien beau de demander un engagement fort des employeurs, mais on ne le demande pas à ceux qui font du profit et qui en ont les moyens, on le demande aux employeurs du secteur non marchand qui en ont souvent la volonté mais pas les moyens !

L'exposé des motifs figurant en introduction au texte du projet de loi est plus dissert sur la question : "Le succès des emplois d’avenir reposera sur la mobilisation de tous les acteurs. Au premier chef, le Gouvernement souhaite travailler avec les régions afin que leurs dispositifs de formation et de validation des acquis soient accessibles aux publics recrutés dans le cadre des emplois d’avenir. Avec les régions qui le souhaitent, des offres spécifiques pourront également être expérimentées pour répondre aux besoins de publics jeunes et peu qualifiés. Certaines de ces expérimentations pourraient préfigurer un futur droit à la qualification différée." La suite du texte se réfère à la mobilisation des partenaires sociaux.

Bien évidemment, en ce qui concerne notre région, je proposerai que l'on travaille en ce sens. Encore faut il que l'on en ait la possibilité ! j'y reviendrai.

Car si l'exposé des motifs ouvre des portes, le texte même du projet de loi les ferme ! On découvre en effet que les contrats d'avenir ne vont être que des formes particulières de CAE (contrat d'accompagnement dans l'emploi) ou CIE (Contrat Initiative Emploi), et que les dispositions s'appliquant à ces contrats sont valables, sauf dispositions contraires, comme la durée (au moins un an renouvelable trois fois) ou le temps de travail (à temps plein). La seule référence à la formation dans le texte concerne le dossier permettant à l'employeur de toucher l'aide qui devra indiquer " les actions de formation, réalisées pendant le temps de travail ou en dehors de celui-ci."

Les difficultés majeures de financement de la formation des personnes en contrats aidés vont donc se retrouver sur ces contrats d'avenir : pour les financeurs de la formation des salariés, ce ne sont pas des salariés comme les autres, mais pour les financeurs de la formation des demandeurs d'emploi, ce ne sont pas des demandeurs d'emploi ! Alors, oui, il faudra bien, pour le succès des emplois d'avenir une mobilisation des régions et des fonds de la formation des salariés, mais la loi fait l'impasse sur le comment ! Et depuis 2004, la loi de cohésion sociale et la suppression des fonds de l'état dans la formation des contrats aidés, c'est l'impasse sur cette question.

Le deuxième aspect de la loi qui ferme les portes de la formation est celle du temps de travail, car si la longueur du contrat, bien supérieur à celle des CAE actuels est évidemment un plus pour un vrai parcours d'insertion, le temps plein m'interroge et la notion de formation en dehors du temps de travail encore plus ! Et j'ai d'ailleurs du mal à imaginer comment un employeur potentiel pourra faire un dossier indiquant les actions de formation prévues pour un jeune qu'il connaitra encore très imparfaitement puisque ce sera avant son embauche.

Rêvons d'un vrai contrat pour l'avenir d'un jeune : du boulot tout de suite avec un vrai salaire à temps plein. Là dessus, aucun désaccord avec le projet de loi, de quoi redonner le moral au jeune, lui montrer qu'il peut être utile dans la société, qu'il y a sa place, même s'il est sorti sans qualification de l'école. Mais sur son temps de travail, il faut qu'il puisse aller voir son conseiller à la mission locale, faire un bilan de compétence, participer à des actions d'orientation professionnelle ... bref se bâtir un projet professionnel et quand c'est mûr, toujours sur son temps de travail, si nécessaire pouvoir bénéficier d'actions de remise à niveau, avant une formation qualifiante qui pourrait être en alternance, toujours dans le cadre du contrat d'avenir. Ce serait un contrat à temps plein pour le jeune, ceci lui garantissant un salaire et un contrat à temps variable pour l'employeur, le jeune travaillant de moins en moins au fur et à mesure que l'aspect formation monte en puissance, mais étant de plus en plus compétent et de toute façon, l'employeur ne paie qu'un quart du salaire.

Alors, oui, je le disais, je proposerai que la région contribue à la formation des contrats d'avenir, mais il faut à la fois que la loi prévoit la formation sur le temps de travail (et les actions d'accompagnement) avec maintien du salaire et donc l'aide financière de l'Etat quelque soit la durée effective de travail et il faut que le gouvernement prévoit un mécanisme financier permettant aux régions de s'engager dans cette voie, car, de par leur compétence, ce sont effectivement elles qui sont le plus à même d'adapter l'offre de formation aux besoins de ces jeunes. 100 000 emplois d'avenir en France, cela devrait en faire de 2000 à 2500 en Champagne Ardenne et on ne trouvera pas sous le sabot d'un cheval de quoi financer la formation de 2000 jeunes ! Et étant optimiste, on peut se dire qu'il y en aura quelques uns de moins à l'Ecole de la deuxième chance ou sur les actions du programme régional de formation, mais il y a malheureusement beaucoup plus que 2000 jeunes au chômage en région. Les derniers chiffres officiels indiquent 11029 demandeurs d'emploi de moins de 25 ans inscrits à Pôle Emploi. On sait que particulièrement pour les jeunes, l'inscription à Pôle emploi n'est pas la règle en cas de recherche d'emploi, puisque tous ceux qui n'ont pas travaillé ne sont pas indemnisés. Alors pour que la formation des jeunes en contrat d'avenir ne retentisse pas sur la formation des jeunes qui n'auront même pas la chance d'avoir un tel contrat, il va falloir que l'Etat en paie une bonne part ! C'est toute la question des ressources des collectivités territoriales et en particulier des régions qui est posée ! Là aussi, le changement cela doit être maintenant !

Et j'entends bien que des expérimentations pourraient préfigurer un droit à la formation différée : je pense qu'effectivement, les régions, avec des dispositifs comme les écoles de la deuxième chance, mais aussi toute leur capacité à pousser à l'innovation, ont toute leur place dans la mise en place d'un droit à la formation différée. Mais je le dis aussi clairement : le financement ne peut être que celui de l'Etat, en lien étroit avec le budget de l'Education Nationale, car il n'est pas envisageable que ce ne soit pas le même qui finance la formation initiale et ses échecs nécessitant une formation différée ! Que ce soit l'Education Nationale qui finance le droit à une formation différée me paraît une incitation nécessaire pour éviter la multiplication des sorties sans qualification.

Après cette longue, sans doute trop longue, diversion sur l'aspect formation, revenons aux questions de fond évoquées plus haut. Elles soulèvent à mon sens trois groupes de remarques :

- le financement des activités à utilité sociale avérée : cela fait maintenant plusieurs décennies (les TUC, travaux d'intérêt collectif, ont été créé en 1984 par le gouvernement Fabius) que les associations, les communes bénéficient d'aides de l'Etat sous forme d'aide à l'emploi pour des activités socialement nécessaires qu'elles n'ont pas les moyens de réaliser sans ces aides. Ne faut il pas reconnaître que ces activités sont indispensables mais non solvables, relevant donc du financement collectif par l'impôt  et en tirer les conséquences pour des dotations aux collectivités ou des subventions aux associations, permettant la création d'emplois durables de qualité ?

- la sortie de jeunes sans qualification de l'Education Nationale pose toutes les questions relatives à la transformation nécessaire de l'école en France. Je ne m'étendrais évidemment pas sur cette question ici, qui nécessiterait de longs développements. Mais comme je n'ai rien dit dans tout cet article sur cet aspect particulier des contrats d'avenir que sont les emplois d'avenir professeur, il y aurait aussi beaucoup à dire - et à critiquer - j'en profite pour vous donner dans ce paragraphe le lien avec l'article de Nouvelles des Ardennes à ce sujet, reprenant le communiqué du réseau école du PCF : vous pouvez le lire en cliquant ici. (N'hésitez pas à dérouler la page vers le bas).Petit-logo-emplois-davenir

- enfin on contourne le problème des entreprises qui ne veulent pas de jeunes sans expérience car elles ont peur de perdre sur leurs profits en consacrant un peu de temps à de l'accompagnement des jeunes. Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec le premier ministre allant rassurer le patronat à l'université du MEDEF, mais aussi avec les déclarations sur l'emploi : ce même communiqué de presse du conseil des ministres du 29 août qui préesnte les emplois d'avenir, annonce des actions en profondeur sur le financement de la protection sociale, qui, je cite " repose aujourd’hui trop largement sur le seul travail." Arrêtons de vouloir baisser le coût du travail, une véritable offense aux travailleurs. C'est le coût du capital qui doit baisser.

Mais ne vous inquiétez pas : les contrats d'avenir ont déjà leur logo !

Plus sérieusement, en guise de conclusion, je vous invite à lire ce que les jeunes pensent de ce projet, de leurs besoins : cliquez ici, pour voir l'interview de Pierric Annoot, secrétaire général des jeunes communistes dans l'Humanité.

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